Sylvain Dorey, Spécialiste en Shiatsu partage son témoignage
Auteur : Publié le 25/02/2021 à 08h16 -Parmi nos missions : adresser des encouragements aux étudiants et aux jeunes professionnels, et diffuser les informations pédagogiques nécessaires pour comprendre ce qu'est la pratique professionnelle quotidienne du shiatsu. Faire du shiatsu c'est choisir un métier difficile. Cependant avec une formation sérieuse, l'acquisition de solides compétences et de la volonté, notre profession est extraordinaire sur bien des plans : humains, sociaux, écologiques, économiques... Pour y arriver, toutes les bonnes pratiques doivent être assimilées. Pour vous aider, nos adhérents expérimentés partagent leur expérience. Retrouvez le témoignage de Sylvain Dorey.
Pendant les confinements de 2020 dus à la Covid19, Sylvain Dorey, spécialiste en Shiatsu à Lyon, a mis en place des ateliers Do In en ligne, à destination des familles, et aussi des entreprises.
Nous avons demandé à Sylvain de partager son témoignage sur Shiatsu-France.com
Peux-tu te présenter ?
Sylvain Dorey, 45 ans, Spécialiste en Shiatsu à Lyon dans les locaux de Now Coworking, un grand espace de coworking du 7ème arrondissement. J’y exerce depuis un peu plus de 4 ans. J’habite à Lyon depuis 2001, avec un passage à Bourges entre 2010 et 2016.
A mon retour fin 2016 à Lyon, j’ai souhaité m’installer à temps plein en tant que praticien Shiatsu après avoir exercé un temps à Bourges à partir de 2013.
Qu’est-ce qui t’a amené au Shiatsu ?
Alors Consultant en Système d’Information, je suis depuis 2002 atteint de Spondylarthrite Ankylosante et de la Maladie de Crohn. J’ai découvert le Shiatsu en 2009 dans mon parcours de soin, dans des sessions de groupe animées par une praticienne Shiatsu lyonnaise.
J’y ai découvert la Médecine Traditionnelle Chinoise et la technique Shiatsu, dont les effets ont immédiatement été très bénéfiques, alors que les traitements médicamenteux n’étaient pas très efficaces malgré la quantité de médicaments absorbés. Je comprenais avec un point de vue nouveau ce que je vivais, et les douleurs s’atténuaient, je regagnais du confort au quotidien.
J’ai en 2010 déménagé à Bourges, et quand j’ai cherché un praticien Shiatsu, j’ai découvert l’Ecole d’Hervé Eugène à Luynes près de Tours. Je suis allé à une journée portes ouvertes, et j’ai décidé d’y entamer une formation pour prendre soin de moi de façon plus autonome. Acquérir des bases de Médecine Chinoise et de Shiatsu me semblait très adapté pour chercher moi-même des pistes de traitement autres que l’allopathie.
Où est-ce que tu t'es formé ?
A l’Ecole Française de Shiatsu à Luynes (37), dirigée à l’époque par Hervé Eugène et Rachel Caille.
Quel style shiatsu as-tu étudié ?
Le Kenko Shiatsu, Shiatsu "Santé"
Avoir un titre RNCP « Spécialiste en shiatsu » c'était pour toi un prérequis pour suivre une formation ?
Pas du tout parce que le titre n’existait pas à l’époque. J’ai suivi la formation de 2011 à 2013, et c’est en 2016 que j’ai demandé à obtenir le titre RNCP de Spécialiste en Shiatsu. Et comme à la base mon intention n’était pas de faire du Shiatsu mon métier, je ne suis pas sûr que ça aurait été déterminant.
Toutefois aujourd’hui je pense que ça aurait été un élément de décision important sur mon choix de formation, comme un label gage du contenu de l’enseignement.
Comment vis-tu la situation actuelle de la covid à Lyon ?
La situation Covid à Lyon est à mon sens très pénible. Nous devons gérer la densité de population, les brassages dans les transports, commerces, écoles et universités…. Il y est forcément plus difficile de s’isoler que dans des zones plus rurales, et le risque de contamination y est certainement plus grand.
Quand le 1er confinement est arrivé en Mars 2020, que s’est-il passé pour toi ?
J’ai plutôt bien réagi au moment du 1er confinement. J’avais de mon côté décidé de mettre les séances individuelles de Shiatsu en stand-by la semaine précédente, car je sentais monter la pression tout autour de moi. Mes clients me posaient de plus en plus de questions au niveau sanitaire, et les interrogations se multipliaient sur les attitudes à adopter dans notre quotidien. Il faut rappeler le grand flou dans lequel nous étions, avec tellement d’inconnues, dont beaucoup subsistent encore par ailleurs.
A l’annonce officielle du confinement, il y a eu une part de moi qui a refusé de se mettre à l’arrêt. Je me doutais qu’on allait rester confinés au-delà des 4 ou 5 semaines prévues. J’ai cherché comment continuer à exercer, avec un objectif double : ne pas lâcher les personnes qui ont besoin de prendre soin d’eux, et ne pas rester inactif. Le Do In est apparu comme une évidence.
Comment t’es venue l’idée des ateliers en ligne, et comment les as-tu organisés ?
J’ai vu émerger les lives sur Facebook, Instagram ou autres plateformes sur beaucoup de disciplines (Yoga, coaching sportif, méditation..). Aucun de ces modèles ne me séduisait car ils ne permettaient pas d’être véritablement en contact avec les ‘auditeurs’ des séances. Je voulais installer un vrai temps d’échanges et de convivialité en complément du Do In, afin de rompre efficacement l’isolement et répondre aux besoins exprimés par les participants.
J’ai donc choisi Zoom, outil payant pour l’usage que je voulais en faire, et en a découlé le fait de faire payer les participants : un forfait unique de 20€ par foyer pour la durée du confinement. La formule a très vite séduit des clients habituels, puis sont arrivés des personnes que je ne connaissais pas, qui venaient de toute la France, et même de l’étranger. Au total 70 personnes ont participé à nos ateliers quotidiens ‘en direct de mon balcon’, seuls ou en famille. Mon fils de 11 ans m’a souvent assisté, ce qui a permis aux parents de faire participer leurs enfants.
J'ai profité de ces ateliers et de la communication nécessaire pour développer mes réseaux sociaux, et j'ai même créé mon compte Instagram, ce que je n'avais jamais envisagé. Je n'ai jamais été aussi actif sur les réseaux que pendant cette période. J'y ai été bien aidé par des participants aux ateliers qui m'ont expliqué le fonctionnement, et surtout par ma femme Claire qui a créé beaucoup de contenu à publier et m'a soutenu en permanence dans la démarche.
On a fait 37 séances, avec accès au replay pour ceux qui ne pouvaient pas se connecter en direct. Ca n’aura pas été facile tous les jours d’animer les séances, et je suis sûr que le format convivial, ainsi que la non gratuité, ont aidé à tenir le rythme.
Que retiens-tu de cette expérience ?
Un vrai groupe s’est constitué au fil du temps, et je sais que certains se retrouvent ‘dans la vraie vie’ après s’y être rencontrés. Quelques-uns n’avaient aucune expérience du Shiatsu, et aujourd’hui ils font des séances avec des praticiens de leur région.
On a même poursuivi l’aventure jusque fin juillet à raison de 2 séances par semaine, avec l’intervention de 5 autres praticiens de médecines douces (Réflexologie, Aromathérapie, Sophrologie, Méditation et Naturopathie).
Au final c’est une belle et riche expérience, que je n’aurais jamais imaginée et qui est arrivée grâce au confinement. Les retours ont été nombreux et très positifs. Le groupe a été un vrai soutien pour chacun, moi inclus évidemment.
Par ailleurs, suis sûr que cette activité durant le confinement m'a donné une visibilité et une continuité d’activité qui a porté ses fruits au moment de la reprise des séances en cabinet.
Qu’en a-t-il été pour le deuxième confinement en Novembre ?
La facilité de réaction que j’ai ressentie en mai n’était pas du tout au rendez-vous avec le deuxième confinement. J’étais très fatigué fin octobre, après deux mois de travail intense, et le moral a pris un coup sévère quand la sentence est tombée. Je n’imaginais pas qu’on serait reconfinés. Et puis, ce confinement beaucoup moins strict a soulevé beaucoup d’interrogations sur l’autorisation pour exercer ou non. Je n’arrivais pas à décider quoi faire : mon intuition était que je devais fermer, et je voyais la profession lutter pour maintenir l’ouverture de nos cabinets.
La réflexion a été longue et très éprouvante pour moi, puis j’ai décidé de fermer le cabinet et de remettre en place les ateliers en ligne, d’autant plus que j’en avais la demande.
La situation des participants était différente lors du second confinement : beaucoup de personnes travaillaient dans leurs entreprises, et il a fallu adapter les horaires. Nous avons opté pour 4 séances hebdomadaires, 2 à 8h45 et 2 à 19h. Toujours par Zoom et toujours avec le replay à disposition.
Les participants du premier confinement ont eu le plaisir de se retrouver et de nombreux nouveaux nous ont rejoints. L’état général était très différent : beaucoup plus de découragement, d’incompréhensions, et aussi la déception de devoir revivre ça malgré les efforts. On aura continué jusqu’aux vacances de Noël, car le besoin s’en faisait ressentir.
Tu as aussi développé à ce moment-là des ateliers à destination des entreprises, comment cela s’est-il passé ?
Oui, ça aussi c’est inattendu. J’ai été sollicité en Mai pour animer une session pour un réseau d’entrepreneurs. L’expérience a été très positive, et plusieurs participants m’ont à leur tour demandé d’en mettre en place pour leurs équipes.
Depuis le deuxième confinement, je fais de plus en plus de sessions de Do In à distance à destination des entreprises.
Les managers sont à la recherche de solutions pour fédérer les équipes en télétravail, et leur offrir un temps de pause. Le Do In, par son accessibilité et son efficacité, est un outil très cohérent, à budget très raisonnable de surcroît.
Maintenant que tu as repris les séances en cabinet, quelle est la situation (physique, psychologique) de tes élèves et patients/clients ?
Les personnes qui viennent en consultation sont en ce moment extrêmement fatiguées, et très démotivées, découragées. La somatisation bat son plein pour nombre d’entre eux. Ils ressentent le besoin de faire une vraie pause, et de ne pas être en prise de façon permanente. Le relâchement est très difficile, avec l’hiver qui est là, et les perspectives qui sont quasi absentes.
La restriction du lien social, des espaces de loisirs, en plus de l’incertitude voire de la peur, sont difficiles à vivre.
Il y a aussi un phénomène très particulier : il y a le manque du Toucher. Il n’est pas rare d’entendre en fin de séance le patient dire combien ça fait du bien d’être en contact physique direct. L’absence de Toucher est souffrant, je n’en saisissais pas la mesure.
Enfin, certaines personnes qui ont encore des forfaits de séance en cours ne sont pas venues me revoir depuis la fin du 1er confinement, et je n’arrive pas à rétablir le lien avec eux, ni par téléphone ni par mail. J’avoue être un peu inquiet pour eux. Ce sont en général des personnes déjà très fragiles avant.
Quelles sont pour toi les perspectives d’avenir du shiatsu ?
Je vois un bel espace s’ouvrir à nous, car la pratique se répand de plus en plus, et est de mieux en mieux reconnue et comprise. Je pense qu’au même titre que l’Ostéopathie, le Shiatsu pourra devenir un réflexe de consultation en première intention.
Nous avons besoin de continuer sur la voie de la professionnalisation et de la reconnaissance.
As-tu une perception particulière de la reconnaissance de notre métier et du monde professionnel français plus globalement ?
Elle est en cours, ce qui est une excellente nouvelle. Elle est à mon sens indispensable à notre reconnaissance et à notre développement.
Et je crois qu’il y a plusieurs facteurs de professionnalisation :
- Assurer et maintenir une qualité de formation initiale et continue de grande qualité
- Gérer nos activités en véritables chefs d’entreprise : si on veut faire du Shiatsu un métier, ça signifie pouvoir en vivre financièrement, ce qui implique communication, gestion, et rentabilité. De mon point de vue beaucoup de praticiens n’ont pas assez en vue la rentabilité de leur activité, ce qui va à l’encontre de leur volonté d’aider le plus grand nombre. Je ne peux continuer à aider que si mon activité me permet de gagner ma vie.
Le développement du Shiatsu et sa professionnalisation doit aussi passer par la structuration d’instances représentatives. C’est en cours avec les actions des fédérations, syndicats, etc... Cela permet de mettre en commun les ressources et d’être assez représentatifs pour peser auprès des instances locales, gouvernementales,…
Je regrette que pour l’instant les structures ne soient pas plus soudées entre elles, semblant porter leur attention sur quelques divergences plutôt que les synergies possibles.
Je suis personnellement adhérent au SPS, à la Société Française du Shiatsu et à Shiatsu France, et je ne me soucie que des actions portées par les uns et les autres, sans autre considération. Les actions de lobbying et de communication sont très importantes et bien réalisées de mon point de vue.
Aurais-tu quelques mots d’espoir pour notre profession ?
Je pense que notre profession a un véritable avenir, et la période que nous vivons le démontre. De plus en plus les Médecines Douces prennent leur place, malgré leur manque de représentation dans les médias. L’allopathie sera toujours indispensable, et dans bien des cas nous pourrons apporter des compléments de solution très efficaces.
Peut-être des idées innovantes pour développer l'activité professionnelle ?
L’interdisciplinarité est quelque chose que je teste beaucoup au quotidien, en faisant des recommandations croisées avec un réseau de psychologues, naturopathes, sophrologues, et autres disciplines encore. Chacun peut apporter sa contribution pour proposer des pistes et alternatives intéressantes. Le développement d’ateliers communs, de temps de partage, permettent des synergies et une visibilité accrues, auprès d’un public qui ne demande qu’à être convaincu qu’une autre voie existe. Tout en restant en ce qui me concerne dans des disciplines qui restent en cohérence avec mes valeurs.
Quelle communication et organisation pour y arriver concrètement ?
La communication croisée entre plusieurs disciplines fonctionne plutôt bien à mon échelle, via les réseaux sociaux notamment. Un véritable élan pour nous faire connaître serait le bienvenu. Shiatsu France le fait très bien avec ses vidéos courtes, à viraliser sur les différents supports.
Pour contacter Sylvain :
© Tous droits réservés Shiatsu-France.com
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