Marie-Joëlle ROSE partage ses missions de shiatsu humanitaire avec des non-voyants à Brazzaville (Congo)
Auteur : Publié le 22/03/2021 à 07h56 -On pourrait résumer la vocation de Marie-Joëlle Rose par le désir de transmettre l'art du Shiatsu et le fruit de son expérience afin que chacun y puise les ferments de sa propre créativité ! Comme elle le rappelle "Se soigner à mon sens, c'est aussi faire émerger ses richesses intérieures". C'est ainsi que Marie-Joelle a étudié le shiatsu et la psychologie, les relations entre le corps et l'esprit, et ce en France et au Japon. Retrouvez ici son témoignage salutaire et instructif sur les formations shiatsu qu'elle a animées auprès de non voyants dans le cadre d'une mission humanitaire à Brazzaville (Congo).
C'est en 1972 que le cheminement à travers sa passion pour les cultures et philosophies orientales et d'une rencontre avec la médecine traditionnelle chinoise à travers l'acupuncture a débuté.
Une rencontre déterminante à un moment ou Marie-Joelle Rose était immergée dans des recherches sur les arcanes de la psyché et s'interrogeait alors sur ces liens avec le corps.
Son désir le plus profond était d'utiliser ses mains pour soigner. La lecture d'ouvrages de médecine chinoise où l'être humain est perçu dans sa globalité corps et esprit intimement liés et interdépendants.
Elle a découvert le shiatsu lorsqu'elle était étudiante en japonais à l'institut des langues et civilisations orientales.
Commençant la pratique à Paris, c'est au Japon qu'elle a étudié le shiatsu avec plusieurs maîtres dont les enseignements fûrent rigoureux et exigeants : travail sur soi, posture, écoute, apprentissage du toucher, du ressenti.
Conjointement, elle étudiait la théorie énergétique orientale, indissociable de la pratique.
Lors de son retour en France, sa perception du monde avait changé. Elle poursuivit l'étude du Shiatsu avec Maître Sasaki et Izumo...
Marie-Joëlle a accompli quatre missions humanitaires à Brazzaville avec Solidarité Homéopathie pour former des praticiens non-voyants au shiatsu à partir de 2007.
Témoignage de Marie-Joëlle Rose, Praticienne enseignante certifiée FFST
MISSIONS HUMANITAIRES AU CONGO-BRAZZAVILLE - FORMATION SHIATSU AVEC DES NON VOYANTS
Un matin d’automne 2007, l’Afrique vint caresser mon esprit, telle la brume sur la montagne. L’Afrique, seul continent que mes pieds n’avaient pas foulé et terre ou certains de mes ancêtres s’étaient installés du temps des colonies. Ce n’était pas cette Afrique là qu’il m’importait de rencontrer. C’était celle des gens de la rue, des villages. L’idée de transmettre le shiatsu m’effleura. Mais je me convaincs vite que je n’avais rien à leur apprendre dans le domaine du corps et du toucher.
Et pourtant !... Peu de temps après j’étais contactée par la présidente de l’association « Solidarité Homéopathie », Marie-Claude Yannicopoulos qui me proposait d’aller former un groupe de non-voyants à Brazzaville (Congo).Sans aucune hésitation je m’engageais pour cette mission humanitaire qui se révélait une synchronicité incontournable. Cette double rencontre, l’Afrique et le monde des non-voyants à qui j’allais transmettre ce magnifique art du shiatsu m’exaltait.
Liliane Delacour, co-fondatrice de l’association Théos (Thérapies énergie santé) m’accueillit le 5 avril 2009 à Brazzaville sous une chaleur torride.
Ainsi, au dispensaire Hahnemann, ils sont là, ces non-voyants, assis, en silence. Et, dans ces yeux qui ne voient pas, une présence saisissante. Ils sont vingt-trois, femmes et hommes âgés de 20 à 58 ans. Ils ont perdu la vue à des âges variés et pour des raisons différentes. Des gens démunis, sans profession, sans perspective. Car, être non-voyant au Congo signifie être marginalisé, rejeté, caché…ce qui résulte dans une grande solitude, une perte de confiance en soi, un sentiment d’inutilité.
Ce projet de formation leur redonnait de l’espoir, une lueur au bout du tunnel ainsi que l’exprime l’un des élèves, Kevin, lors d’une interview avec « La Gazette de Brazzaville » : « Cette initiative est la bienvenue, d’autant plus que, dans notre état de non-voyant, nous sommes comme des personnes coincées entre l’obscurité et l’oisiveté. C’est vraiment pour nous de sortir de l’ombre, de nous mettre à la lumière. »
C’est dans un dojo d’arts martiaux qui nous était prêté que, chaque jour, de 9h à 17h nous nous exercions à l’apprentissage de cet art .Il en fut ainsi durant les quatre missions d’une durée de deux semaines consécutives. Il me fallut adapter mon enseignement. Sans support visuel, la précision et la justesse des mots leur indiquant le geste à réaliser, s’imposèrent. Leurs corps, très raides au début à cause de la tension générée par leur cécité d’une part et d’autre part l’absence d’exercice physique, se délièrent au fil des jours grâce aux étirements effectués.
La pratique, l’enseignement des méridiens releva d’un corps à corps. Avec ma main dans la leur je leur faisais suivre les trajets. Nous sommes bien là dans le voir avec les doigts qu’avec l’expérience tout praticien a acquis !
Je leur appris conjointement à se déplacer dans l’espace, à se mettre en cercle, à se positionner par rapport au corps de leur partenaire.
Conjointement à la pratique pure, je leur enseigne quelques notions d’anatomie et d’énergétique. Certains ne parlant pas vraiment français, Jacques, l’un des élèves se charge de la traduction depuis lingala, la langue nationale.
Au fil, des missions (quatre en tout), je constate leur transformation. Leur toucher s’est aiguisé, leurs corps se sont assouplis, ils déplacent leurs mains avec précision et rythme sur le corps de leur partenaire, leurs visages sont plus ouverts. Dans cet espace temps que furent ces missions, ils sont parvenus à intégrer les trajets de méridiens… car, au lieu de voir les méridiens (qui sont invisibles) comme cherchent à le faire les voyants, ils voient avec leurs doigts ! Belle leçon !
Leur pugnacité ne manqua pas de me bouleverser.
A l’issue de cette formation, ils parlent tous d’un changement dans leur façon de « voir » les choses. Ils sont plus gais, plus confiants, plus communicatifs. Ils parlent d’une nouvelle connaissance de leur corps ainsi que l’émergence de l’espoir d’une vie meilleure.
Voici quelques témoignages des stagiaires :
Odile : « Je suis devenue quelqu’un qui peut travailler pour avoir un bout de pain. »
Hélène : « Un déséquilibre insaisissable pesait dans mon cœur depuis le jour ou je suis devenue malvoyante. A partir de cette formation, un grand changement dans ma pensée et ma façon de voir les choses .Ma vie sera désormais heureuse. »
Jacqueline : « J’ai davantage confiance en moi. Je vais mieux car je suis reconnue par mon entourage. Et puis, quand je suis les méridiens, j’ai l’impression d’avoir les yeux ouverts. »
Kevin : « Le shiatsu m’a sorti du tombeau dans lequel je vivais, de la maison, du quartier ou j’étais perdu .Il m’a permis de m’ouvrir aux autres et au monde. Il m’a appris à communiquer avec l’autre dans la parole et le toucher, à entendre les émotions enfouies dans une personne et à être à l’écoute du corps, de la vie .Le shiatsu, c’est du bonheur, de la joie d’en recevoir et d’en donner. Le shiatsu est pour moi comme de l’or dans mes mains. »
Le 6 novembre 2010 ma mission s’est achevée. Durant ces deux années avec l’aide et le soutien de Liliane Delacour et accompagnée de quatre de mes élèves, j’ai formé quinze femmes et hommes non-voyants. Parmi eux, certains pratiquent, d’autres ont intégré l’administration. Malgré la distance géographique, je suis toujours en lien avec eux, plus particulièrement avec Jacques, le délégué du groupe.
Ils ont imprimé en moi une force de vie extraordinaire et, lorsque la mélancolie s’empare de moi, celle-ci me permet de percevoir la lumière. Ils n’ont rien mais ils possèdent ces essentiels : l’énergie de vie et le mouvement du cœur.
Si le shiatsu leur a donné de nouveau yeux, ils ont éclairé le chemin de cet art que je pratique avec passion.
Des ténèbres à la lumière. Ainsi pourrais-je qualifier cette mission avec ces non voyants.
Retrouvez les lettres d'information et les photos
https://www.shiatsu-france.com/files/lettrecongo.pdf
https://www.shiatsu-france.com/files/lettrecongo2.pdf
Pour contacter Marie-Joëlle :
Marie-Joëlle Rose Shiatsu Valence (shiatsu-france.com)
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