Épisode 1 : Shiatsu en France et Shiatsu au Japon
Auteur : Publié le 07/12/2022 à 20h13 -Le shiatsu est aujourd'hui universel. Il prend ses racines au Japon. Il est une synthèse manuelle japonaise. Il s'est développé dans de nombreux pays à partir des années 1950-60, période où il est arrivé en France. Et son développement continue encore aujourd'hui, pour le bien de tous. Mais étudie-t-on le shiatsu de la même façon en France qu'au Japon ? Existe-t-il des différences notables entre les deux pays ?
Est-ce qu'il existe actuellement des différences dans la diffusion du shiatsu en France et au Japon ?
La réponse est oui.
Afin d'y voir un peu clair, je vais aborder ce vaste sujet en plusieurs épisodes.
Episode 1: le shiatsu au Japon d'abord
Le shiatsu a été approuvé comme massage médical en 1955 pour son efficacité non seulement dans le traitement des maladies mais également dans leur prévention.
Il a été notifié officiellement en 1964 en tant que shiatsu distinct des autres types de massage.
SHIATSU est donc un mot japonais qui se traduit par pression des doigts ou pression digitale.
Fondamentalement, la pression est appliquée en appuyant sur la peau avec principalement la pulpe du pouce. La méthode incorpore également des pressions à l'aide du coude, de la paume de la main, etc.
Tokujiro Namikoshi et Shizuto Masunaga sont des personnes connues pour avoir établi certaines bases du shiatsu. Le premier est clairement la personnalité qui a fait un pont entre philosophie orientale et occidentale, et a permis d'établir la reconnaissance du shiatsu d'abord au Japon. Le second a développé les concepts de la médecine orientale en approfondissant les connaissances des méridiens issus de la médecine chinoise et en ajoutant des extensions à ces méridiens.
Il existe au Japon des écoles incontournables qui font la promotion du shiatsu comme le Japan Shiatsu College, Kurétaké Gakoen, et d'autres du shiatsu des méridiens avec l'esprit oriental comme le Iokai Shiatsu Center.
On dit souvent en Orient que les actions du shiatsu sont d'améliorer le flux d'air c'est-à-dire la circulation du Ki.
Ki étant le flux d'énergie qui fait bouger tout être humain. La pression des doigts est appliquée au corps en entier pour soulager le malaise qui cause la maladie, pour renforcer ce corps et son immunité.
Même si les champs d'application du shiatsu sont étendus, il est extrêmement efficace en traitement préventif.
Le métier au Japon
Au Japon, il y a plusieurs voies d'étude du shiatsu dont une orientée vers l'acupuncture et l'autre vers le massage.
Il y a un 1 titre officiel qui est décerné : Anma Massage Shiatsushi.
Pour travailler en tant que Anma Massage Shiatsushi, il est nécessaire d'étudier pendant trois ans ou plus dans une école de formation professionnelle ou de soutien spécifique créée par le ministre de la Santé, du Travail et du Bien-être ou du ministre de l'Éducation, de la Culture, des Sports, de la Science et de la Technologie, et de passer les matières nécessaires à un examen national.
Il existe peu d'écoles de formation pour devenir Anma Massage Shiatsushi, environ une vingtaine au Japon.
Et il n'y a pas d'école par correspondance donc il faut se rendre dans l'école.
Le programme d’enseignement diffère d’une école à l’autre. La médecine orientale peut être largement enseignée alors que d'autres écoles axent plus les études sur la médecine occidentale.
Généralement, l'examen s'effectue au bout de 3 ans avec environ 2500 à 3500 heures de cours selon les écoles.
Après avoir passé l'examen national, il est courant de trouver un emploi dans les hôpitaux, les entreprises, les cliniques de traitement, les centres de massage, les clubs de sport, les maisons de retraite.
En outre, certaines personnes sont actives dans divers domaines, tels que les sites médicaux et de protection sociale, l’industrie de la beauté ou le monde sportif.
La situation au Japon
Le nombre de personnes travaillant comme Anma Massage Shiatsushi était de 113 215 employés en 2014.
Le nombre de cliniques pratiquant l'Anma, le massage et le shiatsu, l'acupuncture et la moxibustion est en augmentation depuis les années 2000.
Ces dernières années, le lieu d’activité du massage Anma Shiatsu s’est étendu au domaine du bien-être.
La population nippone "consomme" le soin shiatsu de diverses manières : de l'entretien pour décontracter et dénouer les courbatures musculaires en se rendant régulièrement dans un centre ou chez un praticien en libéral, au massage médical de visite dans le cadre d'un travail ciblé à l'hôpital ou à domicile.
Les visites de massage médical
Au Japon, il existe notamment l'assurance de soins et l'assurance maladie. Ces assurances s'appliquant pour les visites de massage médical (ou massages de visite) et les visites de rééducation.
Les massages de visite sont effectués par les personnes certifiées (certificat national) Anma Massage Shiatsushi.
Ces massages de visite peuvent répondre aux soins de santé, c'est-à-dire pris en charge par l'assurance maladie, s'ils répondent à plusieurs exigences comme :
- le but : celui d'améliorer la douleur, les engourdissements, les gonflements, la récupération et le maintien des mouvements articulaires,
- les conditions médicales applicables, maladie, symptômes tels que paralysie musculaire, atrophie musculaire, dysfonctionnement moteur, etc.
- un document fourni par un médecin : accord ou certificat médical.
Le massage médical peut être réalisé aux frais de la personne. Dans ce cas, il n'y a pas besoin de l'accord d'un médecin.
Le consentement écrit du médecin (diagnostic) est nécessaire pour l'utilisation par l'application de l'assurance maladie.
Les massages de visite ciblent d'abord toutes les personnes qui ne peuvent pas aller à l'hôpital parce qu'elles ont du mal à dormir ou à marcher. Mais ils s'adressent également aux personnes rentrées chez elles après une période d'hospitalisation, aux personnes en phase terminale, aux personnes dont les membres deviennent raides et qu'il devient difficile de bouger, aux personnes qui travaillent sur la réhabilitation, et lorsque les soins à produire restent court.
Ce sont généralement les physiothérapeutes qui s'affairent aux visites de rééducation. Et il y a nécessité d'avoir une feuille de soins produite par un médecin.
Parmi les effets "officiels" que les massages de visite procurent, on note les effets anti-inflammatoires et analgésiques qui améliorent la circulation sanguine et lymphatique, le repos mental et également l'amplitude des mouvements articulaires. Le massage vise l'amélioration de la fonction motrice, la formation du rythme de vie.
La demande augmente surtout pour les massages de visite.
La société niponne étant vieillissante, la demande d’Anma Massage Shiatsushi augmente dans les centres de rééducation et les maisons de retraite.
Le shiatsu en France maintenant
Le shiatsu n'est pas clairement légiféré en France. En effet, il n'existe pas de diplôme d'Etat.
Il n'est donc pas exercé de la même manière en France qu'au pays du Soleil Levant, et c'est le moins que l'on puisse dire.
Programmes d'enseignement, volume d'heure d'études, non reconnaissance du diplôme, dénomination du métier, secteurs professionnels d'activités moindres, nombre de praticiens formés, connaissance du grand public, non prise en charge par la Sécurité Sociale, les disparités ne manquent pas.
Pourtant, nous sommes censés exercer la même méthode manuelle.
Les différences notables entre le shiatsu en France et au Japon
La première grande différence entre la pratique du shiatsu dans la société française et japonaise est que le shiatsu n'est pas reconnu en France par le Ministére de la Santé.
Il n'est pas reconnu comme médecine conventionnelle.
Comme il n'est pas reconnu, il n'est pas intégré au système médical conventionnel.
Deuxièmement, les programmes d'études pour devenir professionnel en shiatsu sont très disparates, plus ou moins normés et surtout non homogénéisés. Il existe de nombreuses écoles et divers organismes de formation en France.
Quelques organismes reconnus par l'Etat délivrent un diplôme ou un certificat.
Ces organismes de formation sont des structures juridiques avec différentes nominations, de l'association à la société en responsabilité limitée.
Il y a également des écoles régionales où l'enseignement peut être sérieux.
Certaines associations sont rattachées à la FFST, d'autres au SPS, d'autres à la Société Française du Shiatsu (network Shiatsu France), d'autres encore ont fait le choix de n'adhérer à aucune organisation.
La plupart des organismes étant privés et gérés par leur fondateur, le manque d'harmonisation générale est sans doute l'une des caractéristiques majeures dans les formations proposées en France.
En lire plus sur devenir un praticien
Troisièmement, le nombre d'heures d'étude pour devenir professionnel en shiatsu. Une formation en France dure en moyenne 500 heures. Les programmes les plus "copieux" avoisinnent les 750 heures. Pour rappel, au Japon la fourchette va de 2500 à 3500 heures d'étude. Il y a des organismes en France qui proposent de faire du shiatsu familial avec une centaine d'heures de pratique sans ou avec peu de théorie. D'autres écoles proposent seulement 350 heures de pratique avec un quota de 150 heures à faire par le stagiaire chez lui, pour être certifié praticien voire acquérir le titre RNCP de Spécialiste en shiatsu.
Quatrièmement, il n'y a ni diplôme d'état, ni diplôme universitaire au niveau national. Tout comme les pratiques manuelles : ostéopathie, chiropraxie, étiopathie, le shiatsu est enseigné dans des organismes privés.
Enfin, la plupart des praticiens formés exerce en professionnel libérale. Ce sont des indépendants. Beaucoup effectuent en même temps un autre métier et l'activité shiatsu reste souvent secondaire. De plus en plus de personnes animent aussi des stages en complément. Quelques-uns exercent parfois dans des centres spas.
En réalité, le nombre de praticiens installés exerçant à temps plein n'est pas si important. Il n'y a pas de chiffre officiel du nombre de professionnels installés en France et l'exerçant en activité principale.
Si on ajoute les adhérents (ce qui ne veut pas dire qu'ils pratiquent tous à ce jour et surtout que ce soit leur activité professionnelle principale) des organismes nationaux et des écoles régionales, on peut estimer à environ 5000 professionnels formés en France (hors shiatsu familial et shiatsu amma assis) avec environ 1200 à 1500 qui travaillaient avant la crise de 2020. En comparaison, il y a plus de 30 000 ostéopathes et environ 90 000 kinésithérapeutes.
Certes le nombre d'étudiants en shiatsu est en légère augmentation depuis une dizaine d'années.
Et c'est tant mieux !
En savoir plus sur s'installer comme praticien
Mais beaucoup de professionnels ont arrêté ou mis de côté leur activité depuis cette crise sanitaire liée au covid. Son nombre est d'ailleurs tombé au plus bas, environ 800 personnes exerçant à temps complet et ayant comme seule source de revenus la pratique libérale de massages shiatsu.
Ce point est ainsi plus alarmant...
En résumé
Comme nous venons de le voir, un fossé juridique, technique, pédagogique existe aujourd'hui entre les deux pays.
Mais le shiatsu peut rassembler car il est unique.
Il s'adapte à presque à toutes les populations.
Il peut s'exercer pratiquement partout.
Ses effets bienfaisants pour le receveur sont tellement profonds et agréables.
Il agit de manière efficace aussi pour le donneur. La pratique professionnelle du shiatsu participe à son entretien physique telle une gymnastique quotidienne.
Si l'on souhaite sincèrement que le shiatsu trouve sa juste place dans la société française, des ajustements pédagogiques et informatifs paraissent incontournables.
Certains ont clairement débuté un travail essentiel il y a plus de 15 ans en s'associant à des équipes médicales dans des hôpitaux publics par exemple. Les projets avec le monde médical sont de plus en plus nombreux. Les initiatives associatives voient le jour dans diverses structures et régions.
Des organismes nationaux comme la Société Française du Shiatsu développent les échanges avec des organisations japonaises.
Des initiatives locales sont aussi portées en Province par des associations et des écoles de moindre envergure mais toutes aussi actives afin de favoriser les interactions avec les professionnels japonais.
Valoriser, homogénéiser, démystifier sont à mon sens les axes de travail.
Il appartient alors aux organisations françaises de s'organiser, d'élaborer les outils adéquats et cohérents, et, de mettre en oeuvre les actions permettant d'atteindre un niveau d'exigence professionnelle nécessaire à la reconnaissance du shiatsu par les pouvoirs publics et le grand public.
Notre système français légal, médical, organisationnel étant très singulier, il conviendra d'user de patience et d'élargir les coopérations tout en gardant à l'esprit de ce qu'est le shiatsu.
Lire la suite dans l'épisode 2 : Shiatsu en France vs au Japon
Lire la suite dans l'épisode 3 : Shiatsu en France vs au Japon
Antoine Di Novi
Fondateur et Rédacteur en Chef de Shiatsu-France.com
© tous droits réservés - Shiatsu France
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