Pierre Amatore : SPS, Thérashiatsu, un homme sur tous les fronts...
Auteur : Publié le 26/05/2020 à 08h38 -Marseille fait ainsi partie de ces villes à part. Atypique et d'une richesse culturelle incroyable, Massilia est notre ville antique française qui regorge de talents et d'acteurs remarquables. Le shiatsu ne manque pas à l'appel. Je partage mon entrevue avec un habitant du front de mer, Pierre Amatore. A la fois spécialiste en shiatsu, formateur à Thérashiatsu et membre du Conseil syndical du Syndicat des Professionnels de Shiatsu, Pierre nous en dit plus sur ses missions, son parcours et ses activités.
Entretien avec Pierre Amatore
Antoine Di Novi : Bonjour Pierre Amatore, merci d’accorder un entretien à Shiatsu-France.com
Pierre Amatore : Bonjour Antoine, c’est avec plaisir
ADN : Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots votre parcours et depuis quand vous faites du shiatsu ?
PA : Alors, bon… en fait, j’ai eu un parcours un peu atypique mais je vais essayer de faire court, donc après un Bac et des études scientifiques en biologie, service militaire, puis photographe, puis Beaux Arts, puis graphiste, ça c’est pour le parcours hors Shiatsu.
Parallèlement à cette vie … Judo, dès le CP, puis Karaté Shotokan puis Full contact, et oui… j’étais jeune… et en prenant de l’âge, retour au Shito ryu et à des disciplines plus internes comme le Chi kung et le Tai chi chuan… puis plus tard, une courte reprise en Shaolin kung fu pour pratiquer avec mon fils (double champion de France – 2017 lui, pas moi !) puis plus rien depuis quelques années… les jours n’ont que 24 heures et il faut faire des choix… et comme tout le monde le sait, un choix est également un renoncement… en regardant mes abdos je me dis que ce n’était pas le bon choix [rire] même si je continue à pratiquer en Do In et/ou Taiso surtout pendant cette période surréaliste…
Alors comment je suis arrivé au Shiatsu ? Et bien comme beaucoup par les arts martiaux, je crois que c’est aussi ton cas Antoine ?
ADN : Oui effectivement.
PA : Pendant mes années Karaté j’ai été initié aux Kuatsu, les techniques d’urgences dont beaucoup ne sont plus autorisées à l’heure actuelle, c’était déjà le cas pour certaines à mon époque. Ce nouveau monde qui s’ouvrait à moi me fascinait j’ai donc cherché à en savoir plus et j’ai étudié la MTC, puis un long stage aux USA dans le cadre d’un échange d’étudiants en Arts entre Aix et Pittsburg. Pendant ce stage, ne maîtrisant pas l’anglais — je ne parle pas beaucoup mieux maintenant [rire] — je me suis inscrit dans un cours qui s’appelait « Martial Arts & Shiatsu » plus pour connaître des gens que pour pratiquer, c’était en 1991. Et là, encore un nouveau monde qui s’ouvrait, les « techniques » utilisées à la fin des cours … avec le recul, un « mélange » entre Kagotani et Ohashi… étaient d’un bénéfice impressionnant, du coup j’ai suivi le cursus de 240 h en shiatsu.
De retour en France, Acupuncture et Shiatsu ont été mis « sous le coude », il fallait que je finisse mon cursus artistique. Ensuite que je gagne ma vie… je monte plusieurs entreprises (pas en même temps [rire]) : dans la photo, le T-Shirt, le graphisme. Puis, prenant de l’âge, ayant une vie de famille, le graphisme n’était plus pour moi, les boulots « charrettes » me demandaient trop de temps de récupération, ceux qui sont dans le graphisme me comprennent [rire] donc il fallait que je me reconvertisse vers …? et comme je n’ai jamais arrêté le shiatsu depuis 1991, beaucoup de combattants venaient me voir en me disant « Pierre tu peux voir… j’ai une douleur à l’épaule, …, au dos, … , aux cheveux [rires] » je me suis dit que le shiatsu s’imposait de lui-même, j’avais de bons retours… donc j’ai repris des cours pour avoir une certification française en Namikoshi (sans parler de ma première formation pour ménager les susceptibilités)…[rires]. C’était dans les années 2000. Pendant 6 ans, je crois… je suis resté avec une double activité, graphisme (alimentaire) et shiatsu (passion) tout en continuant à suivre des stages ou séminaires de Maitres Japonais et Européens.
Comme je voulais pratiquer, la pratique il n’y a que cela de vrai !!! j’ai commencé à travailler dans un centre de soins palliatifs en plus des séances en cabinet. Mais recevoir au sol posait problème pour ce public, je suis donc passé sur table.
Début de l’aventure Table !
En 2012 l’équipe qui intervenait sur ce centre a été sollicitée pour une conférence lors du congrès de la SFAP (Société Française d’Accompagnement et soins Palliatifs). Dans mes recherches internet pour argumenter sur « les disciplines complémentaires comme soins de support », je tombe sur l’association Asthme et Allergie 13, ma fille est asthmatique, je ne connais pas cette structure, je vais les voir… et me retrouve à animer des ateliers Shiatsu en Education Thérapeutique du Patient (ETP), puis je passe mon certificat en ETP. Entre temps, je crée une association pour répondre à des demandes de formation et je suis contacté par un CHU pour intervenir dans leur service de gestion de la douleur pour le personnel et plus tard pour les consultations externes. L’ETP était en plein essor et l’Espace Santé de l’APHM me sollicite pour animer également des ateliers Shiatsu sur les RIC (Rhumatismes Inflammatoires Chroniques), j’avais d’ailleurs fait une présentation sur l’ETP lors du congrès des Journées du SPS en 2017 … et récemment je suis intervenu sur le DU Shiatsu proposé à Orléans pour le module RIC et MICI (Maladies Inflammatoires Chroniques de l’Intestin)… voilà grosso modo pour le shiatsu …
ADN : Et bien, c’est un "grosso modo" avec de sacrées expériences ! Des arts martiaux aux soins en ETP, du futon à la table, de Kagotani/Ohashi à Namikoshi votre pratique du shiatsu semble étayée, c’est intéressant. Et à propos de votre activité en libéral, où exercez-vous ?
PA : Oui, depuis 2008 en centre ville de Marseille et, le projet est retardé du fait du confinement, en association avec d’autres Shiatsushi… j’ai toujours du mal avec ce mot… [rires] … donc avec Norma et Lionel (et d’autres pourquoi pas ?), nous allons créer le Centre de Soins Shiatsu de Marseille.
ADN : Ah bon, l’usage du mot Shiatsushi vous pose problème ?
PA : Non…oui … c’est la sonorité, pour les non-initiés ils entendent plus « sushi » que shiatsu…
ADN : [rires] Je n'avais jamais entendu cela encore ! Sinon, je crois que vous dirigez également une école ?
PA : Également…oui… ThéraShiatsu, qui a été créé en 2014>2016 sous la « pression » [rires] d’étudiant.e.s qui venaient recevoir leurs séances obligatoires dans le cadre de leurs études de Shiatsu. Souvent, les discussions en fin de séance, après les explications du travail entrepris, finissaient par « Pierre, quand c’est que tu montes ton école ? »
L’idée me séduisait, j’adore transmettre… mais même si mon premier « diplôme » date de 1991, avais-je l’étoffe d’un enseignant ? En 2014 je crée une association pour effectuer des formations courtes en directions du personnel hospitalier, des professionnel.les des spa… et cette association s’est transformée 2 ans après en SASU sous le nom de ThéraShiatsu. Mais je suis avant tout un praticien, c’est ce qui me fait vivre, je suis bénévole dans ThéraShiatsu même si cela me prend beaucoup de temps…
Et comme le temps n’est pas extensible… j’ai transformé les interventions que je réalisais en milieu hospitalier, en cours « cliniques » pour mes stagiaires. En petit groupe, nous recevons un patient, un « vrai patient » qui peut venir du service gastro, pneumo, cardio… l’élève qui va effectuer la prise en charge réalise la prise de renseignements, puis nous sortons pour discuter des stratégies à mettre en place ensuite l’élève réalise sa séance sous ma supervision et cela in situ, à l’hôpital… c’est entre autre pour cela que je préfère limiter le nombre d’élèves à une dizaine environ par niveau …
ADN : Quel style de shiatsu enseignez-vous dans votre école ?
PA : Le centre propose 2 cursus : un en week-end sur deux années (252 h) et l’autre en semaine sur deux années (504 h).
Le 1er propose le style Namikoshi ; il est dirigé par Nathalie Bernardinelli, instructrice Shiatsu Namikoshi Europa et mène au certificat Namikoshi.
Pour le 2nd, c’est le ThéraShiatsu qui y est enseigné et mène au titre RNCP. Les stagiaires du cursus WE peuvent intégrer à la fin de leur cursus, la seconde année du cursus en semaine pour finaliser leur étude (532 h).
Alors la question qui va suivre va être qu’est-ce que le ThéraShiatsu ?
ADN : Vous pratiquez aussi la voyance ? [rires]
PA : Non, juste de l’intuition [rires] Et bien… c’est un Shiatsu qui a évolué, petit à petit, avec l’expérience, la pratique, les différents types de pressions, mes connaissances en énergétique, mes essais, mes échecs, les bénéfices observés … mais surtout c’est un shiatsu entièrement dédié à la table.
ADN : Effectivement, l'usage de la table est plein d'avantages.
PA : La table n’est pas « un sol plus haut », c’est un nouvel espace qui possède ses propres règles de déplacements, de transfert de poids, de mise en place d’une stratégie de traitement… c’est pour cela que je dis souvent que je ne fais plus du Shiatsu traditionnel mais du ThéraShiatsu.
Par contre étant conscient que l’apprentissage, les genoux au sol (même si sur table le cas se présente) est primordial pour apprendre, intégrer et surtout comprendre le geste, le placement, le transfert, le cursus sur table débute par une ou deux années au sol. Après, je forme des praticien.nes pas des futurs enseignant.es…
ADN : Que représente le Shiatsu pour vous et comment le définiriez-vous ?
PA : Ouch… déjà de quoi parle-t-on ? de la pratique du Shiatsu ou du Shiatsu traditionnel ? Parce que pour le traditionnel, je ne suis sûrement pas la bonne personne pour en parler …
Pour moi, le Shiatsu est un moyen et non pas un but. Comme je te l’ai déjà dit je me sens plus « Formateur » que « Enseignant » et je sais que je dois heurter bon nombre de personnes en disant cela, désolé…
ADN : Désolé, pourquoi ?
PA : Oh…parce que je suis conscient que dire que le shiatsu est un « moyen » cela peut heurter. Mais pour revenir à la question initiale, ma première pensée serait, au-delà de ce que l’on voit sur tous les sites, que le shiatsu est avant tout de la communication non verbale, la compréhension d’un système composé d’un corps physique, psychique, émotionnel, la manifestation d’une réponse mais surtout une pratique réalisée par des « mains intelligentes » c’est-à-dire capables de s'adapter à de nouvelles situations.
Je pense également que le Shiatsu permet d’extraire la « substantifique moelle », comme dirait Rabelais, de tout praticien.ne et par voie de conséquence de toute personne qui reçoit.
ADN : Intéressant, un écrivain humaniste français pour décrire une méthode japonaise ! Et d’une manière globale, que pensez-vous de la pratique du shiatsu en France : niveau, connaissance, état d’esprit ?
PA : On a le droit à combien de jokers ? [rires]
ADN : Ici, pas de joker ! Il faut dévoiler son jeu de cartes [rire]
PA : Franchement… je ne peux pas me prononcer, c’est comme dans tous les domaines il y a de tout et du n’importe quoi… malgré ça, chez les praticien.nes qui ont suivi une « vraie » formation je pense que la satisfaction des personnes qui reçoivent est importante donc plutôt bon signe, quand je dis « vraie » formation je veux dire une formation sérieuse, pas sur 6 week-ends… Après ce que je trouve dommage, c’est que souvent les shiatsushi déroulent les mêmes katas : ils, elles doivent s’ennuyer à force…
ADN : C’est un débat effectivement. Certains pensent que répéter un kata n’a pas de sens, que l’ennui est de mise. Vous qui avez pratiqué les arts martiaux, pensez-vous que les grands maîtres s’ennuyer à répéter les mêmes katas ? Un praticien (récemment membre du SPS je crois) me demandait lors d’un stage au Japan Shiatsu College, si je m’ennuyais à répéter un même kata. Si on en reste à la forme extérieure sans doute mais ce qui se passe à l’intérieur n’est jamais identique selon moi… Le fait même de faire une ligne de pressions sur des receveurs différents font que les pressions ne sont pas identiques… Bref, vaste sujet [rire].
PA : Ce n’est pas ce que j’ai dit… les katas sont fondamentaux bien entendu, comme les gammes pour un musicien, le shiatsu est l’art de faire la même chose différemment, non ? Cependant lorsque le même kata est utilisé quelque soit les dysfonctionnements de la personne qui consulte… ça te viendrait en tête d’effectuer un kata complet en combat ? je pense que non, tu pratiques des gestes qui s’ajustent à la situation, les gestes issus des katas…
Pour revenir à l’état d’esprit, je regrette que très souvent la tolérance n’est pas de mise, notamment entre les différents styles, justement c’est une richesse pour le Shiatsu d’avoir plusieurs styles, cela veut dire qu’il vit, se développe…
ADN : Ah la richesse du shiatsu, c’est d’ailleurs l’un des thèmes évoqué dans notre premier numéro de Shiatsu France Magazine. Revenons à votre région. Le shiatsu est-il répandu à Marseille ? Vous avez peut-être des retours sur la pratique dans les autres villes, régions ?
PA : Les Bouches-du-Rhône sont le deuxième « pôle » après l’Île de France à ma connaissance (sources SPS) et le groupe de la région de Marseille, qui s’étoffe d’année en année, intervient régulièrement en entreprise, lors de manifestations, de salons… pour la promotion du Shiatsu en milieu hospitalier… On trouve des praticien.nes dans tous les départements et les différentes régions bougent de plus en plus, c’est bon signe…
ADN : Selon vous, le shiatsu est plutôt de quelle nature : sport, bien-être, santé, thérapeutique... ?
PA : Il est tout cela ! Cela va dépendre des compétences du praticien.ne, après, je vois où tu veux en venir… Aïe Aïe Aïe Thérapeutique ! Pourquoi ne pas employer le terme ThéraShiatsu [rires] non, non… je plaisante… [rires] le problème de ce mot c’est la législation française donc comme pour le terme « massage » qui a été remplacé par « modelage » par les non-kiné il y a un temps, pourquoi ne pas remplacer « thérapeutique » par « accompagnement à la santé » ? Après pour répondre sur le fond, le simple fait de poser une main aidante, « aimante » sur un corps a des effets thérapeutiques donc…
ADN : C’est vrai que ThéraShiatsu est sur un plan sémantique original, peut-être une piste ? Pour les notions ou plutôt les mots « tabous », « interdits », c’est vrai que chacun porte sa responsabilité et son opinion sur ces sujets. Pour le mot massage, j’ai lu qu’il n’était plus « protégé » depuis janvier 2016 par l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes se focalisant sur la notion de masso-kinésithérapie. Une justice lexicale qui s’impose vu la diversité des massages dans le monde, cela dépasse le monde du shiatsu ! Par ailleurs, vous êtes membre du Syndicat des Professionnels de Shiatsu (SPS). Quel est votre rôle dans ce syndicat ?
PA : Il a changé depuis 2013. A ce moment là, j’avais plus de disponibilités, mon cabinet tournait bien et me laissait du temps libre que je réservais au syndicat, j’ai été membre du conseil syndical, délégué régional PACA, responsable de la communication en 2015, secrétaire général adjoint jusqu’en 2018, Puis, mon cabinet prenant de l’ampleur et des problèmes de santé m’ont fait démissionner n’ayant plus la possibilité ni les capacités d’occuper ce poste ; actuellement, je suis en charge du dossier APA (Activités Physiques Adaptées), c’est le sport sur ordonnance et j’ai repris le rôle de délégué région Sud, important pendant cette période de confinement.
ADN : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le SPS : les membres qui l’administrent ? sa mission ? ses objectifs ? son positionnement par rapport aux autres organisations nationales et locales ?
PA : Euh… beaucoup de questions sur le SPS,
ADN : Heu, c’est seulement la deuxième question… et puis maintenant que je peux échanger avec un membre responsable du SPS je ne le lâche plus ! [rires]
PA : Enfin la deuxième question comporte beaucoup de points d’interrogations, non ? et bien entendu c’est « Pierre Amatore » qui s’exprime, ce n’est pas un communiqué de presse du SPS !
Alors… en fait à ses débuts il y avait tout à créer, c’était du boulot, en 2013 nous étions 60 adhérents avec un budget de fonctionnement de près de… 2.000 € [rire] , je parle de 2013 parce que c’est le moment où j’ai rejoint Jacques Laurent et Florent Dagobert. Et en 2 ans de travail, le SPS a obtenu le Titre RNCP de Spécialiste en Shiatsu, première reconnaissance officielle du Shiatsu et je parlais de tolérance tout à l’heure… qu’est-ce que l’on a pu entendre à cette époque…
Maintenant les choses se sont calmées mais nous continuons le travail ; nous sommes en phase de renouvellement du Titre. L’année dernière le SPS a été initiateur du premier Diplôme Universitaire : Le Shiatsu dans l’accompagnement à la Santé sous l’impulsion de Jacques qui donne sans compter, c’est normal… il est retraité [rires] …
A l’heure actuelle, l’équipe du CS est bien structurée, chacun a un rôle à tenir, il ne faut pas oublier que nous sommes tous bénévoles dans cette histoire…
Alors sa mission et ses objectifs : et bien on peut dire que c’est le rassemblement et la défense des professionnels du Shiatsu, enfin c’est la mission d’un syndicat, et cela tout univers confondu : plus nous serons nombreux plus nous pourrons obtenir les reconnaissances des tutelles afin de créer une branche professionnelle ou d’en intégrer une qui corresponde à notre métier.
Et l’épisode du confinement a montré que le SPS soutenait ses adhérents avec de nombreuses informations sur les aides, les préconisations, les recommandations liées au confinement puis maintenant à la reprise…
On a eu des contacts avec toutes les organisations Françaises et Européennes de shiatsu. Nous leur avons fait des propositions, certaines nous ont rejoints. En tout cas nous n'avons aucune exclusive ce n'est pas notre rôle. Nous sommes donc ouverts à toutes propositions mais pas de temps à perdre… il reste encore beaucoup de choses à faire. Il y a aussi la conception même du Shiatsu qui peut déranger, pour le SPS c’est un métier. Combien de fois j’ai entendu dire que pour vivre du Shiatsu, il fallait être enseignant… Ce n’est pas vrai ! Même si c’est difficile pour le moment… et justement, le SPS essaie de mettre en place un environnement facilitateur pour les professionnel.les, par contre cela impose une ligne de conduite à tenir…
ADN : Je n’avais pas eu écho de cette notion d’enseignant. Parmi les problèmes en France, en Europe également, c’est bien le fait d’un trop grand nombre d’enseignants avec un niveau insuffisant pour former sur le plan professionnel (ce n’est que mon humble avis). Il nous faut rester raisonnable. Le pays a besoin de praticiens et de praticiens bien formés avant tout. Et il y a une multitude d’acteurs qui avec seulement quelques années d’expérience se lancent dans la formation ! La réalité est que les étudiants japonais, après un cursus universitaire en shiatsu de 3000 heures environ (je pense au Japan Shiatsu College ou Kuretake Gakuen, les universités officielles, je dissocie volontairement l’enseignement Maître à Elève dans une petite école ou un dojo), sont bien souvent plus opérationnels que des « professeurs » chez nous.
PA : Je suis d’accord… mais deux pays différents, deux cultures différentes… comment proposer une formation de 3000 heures en France lorsqu’à la fin il n’y aura pas, pour le moment, du travail pour tout le monde ? Regarde les ostéopathes, combien sont aux RSA ? il ne faut pas faire les mêmes erreurs…
ADN : Oui je comprends Pierre mais je ne partage pas tout à fait ce point de vue. Certes deux cultures différentes mais la pratique de la même méthode manuelle de santé "normalement". Il y a en France plus de 30000 ostéopathes pour environ 1500 praticiens en shiatsu. J'ai écrit un édito sur ce sujet en analysant également la kinésithérapie, la chiropraxie et la petite dernière l'étiopathie... Revenons au SPS si vous le voulez bien. Le SPS délivre à travers un réseau d’écoles référencées, le titre RCNP de « Spécialiste en Shiatsu » ? En quoi consiste exactement ce titre ?
PA : C’est un Titre à finalité professionnelle qui valide donc le professionnalisme d’un.e praticien.ne. Ce n’est pas un certificat de fin d’études et n’est pas lié à un « style » particulier ; ce qui est évalué c’est la capacité à prendre en charge une personne, faire une séance adaptée et assurer un suivi de la personne qui consulte.
ADN : Est-ce que tous les spécialistes en shiatsu étudient le même programme : nombre d’heures, contenu ? Dans une même école ? ou cela diverge selon les zones géographiques ?
PA : Non, pas d’uniformisation de la formation. Encore une fois il y a des très bons Spécialistes en Shiatsu qui ont suivi un cursus Namikoshi, Koho, Masunaga… ou de ThéraShiatsu [rires]
Chaque centre de formation a sa propre pédagogie mais doit respecter le cahier des charges du SPS… qu’il a signé lors de son habilitation après un contrôle in situ de la commission pédagogique et sa validation. Après chaque centre peut en faire plus … regarde pour ThéraShiatsu il y a un cursus de 504 h et un cursus de 532 h qui mènent au titre rncp…
ADN : Etant moi-même professionnel, dirigeant, chercheur et passionné je m’interroge sur comment fait le SPS pour s’assurer de la délivrance homogène des formations en termes de contenus, techniques, discours pédagogique, etc. car beaucoup d’organismes sont référencés et leurs dirigeants bien souvent eux-mêmes enseignants ont parfois des compétences disparates. Avez-vous mis en place des processus avec des procédures d’accompagnement, des formations supplémentaires pour les enseignants, des contrôles opérationnels par exemple ?
PA : Pour le Titre cela n’a pas de raison d’être puisqu’il valide le professionnalisme du/de la candidat.e, encore une fois, le SPS ne cherche pas à uniformiser la formation ou la pratique, justement la richesse vient de la différence mais il y a un cadre minimum à respecter.
En plus du cahier des charges qui doit être validé et qui est régulièrement contrôlé in situ, la commission pédagogique travaille à la mise en place d’un suivi en termes de formation des enseignants / formateurs mais je ne peux pas t’en parler, non pas que ce soit un secret [rires] mais comme ce n’est pas moi qui m’en occupe, je sais juste que c’est dans les tuyaux puisque c’est une demande du Conseil Syndical…
ADN : D’accord. En plus du titre RNCP, le SPS propose d’intégrer dans certaines universités un programme pour obtenir un Diplôme Universitaire. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce D.U ?
PA : oui, la première promotion devait sortir en juin 2020, mais avec le confinement cela a été reporté. Je pense qu’il faudra revoir certaines choses comme toujours lors de la création d’un cursus. Mais c’est encore un grand pas franchi …
Un DU - Shiatsu dans l’accompagnement à la Santé - Ce n’est pas rien !
Comme tout DU, il y a des unités d’enseignement, des modules comme l’oncologie, les problématiques psychiques, les maladies inflammatoires chroniques, les TMS… avec une partie « médicale » et une en « shiatsu ». Les intervenants sont des universitaires, des médecins et des professionnels du shiatsu… d’ailleurs certains ne font pas partie du SPS…
Mais si tu veux plus développer sur le SPS, fais un entretien avec Jacques Laurent qui sera ravi je pense de répondre à tes questions…
ADN : Oui je vais le solliciter merci. Ce D.U est vraiment une grande piste de création de valeur. Le shiatsu en accompagnement de la santé fait donc partie des objectifs de reconnaissance à atteindre pour le SPS ?
PA : Oui, cela a été voté par les adhérents lors de la dernière AG, donc c’est une de nos orientations
ADN : Est-ce qu’il y a déjà des étudiants inscrits pour suivre ces formations universitaires ?
PA : oui, 9 élèves sélectionnés par la faculté sur 45 dossiers déposés,
ADN : Que conseillerez-vous aux étudiants qui veulent se former?
PA : De poser leurs bagages parce qu’une formation en shiatsu ça fait changer et il faut être prêt à accueillir cela.
De visiter plusieurs centres de formation, rencontrer les enseignants et surtout de discuter avec des ancien.nes élèves…
ADN : Je vous remercie beaucoup pour cette interview Pierre Amatore.
PA : Merci à vous Antoine, j’ai du mal avec le « vous » tu t’en es rendu compte …
ADN : Entendu ! Pierre je te propose donc de terminer avec ton mini-portrait chinois et encore merci.
Mini Portrait Chinois de Pierre Amatore
Votre principal défaut ?
En avoir plein…
Votre occupation préférée ?
La pratique du Shiatsu… une sorte de méditation…
Votre livre de chevet ?
« Le livre Tibétain de la Vie et de la Mort » de Rinpoché
Votre film préféré ?
Matrix (n°1) peut-être…
Votre jour de la semaine ?
Pas de préférence
Votre devise ?
Changer est la meilleure façon de rester fidèle à soi-même
Journée mondiale de l’asthme sur un vieux gréement, Vieux Port de Marseille
Stage shiatsu Namikoshi avec Onoda Sensei
Reportage Pierre Amatore à La Provence
Reportage Pierre Amatore France 3 Marseille
Stage Shiatsu Assis
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